Thau Energies Citoyennes vue par les étudiants de Sciences Po Paris

Les étudiants de Sciences Po Paris ont réalisé une étude sur la transition énergétique commandée par RTE. Ils ont interviewé et filmé Thau Energies Citoyennes lors du Printemps des énergies renouvelables. Ils s’appuient sur notre exemple pour illustrer les nouvelles solidarités locales.
Article: Marine PARIENTE

Amaëlle Doisy, Sophie Pevergne, Madeleine Poline, et Dimitri Rechov, étudiants du Master Stratégies territoriales et urbaines de l’École urbaine de Sciences Po, sont venus à Frontignan rencontrer les membres de Thau Energies Citoyennes lors du Printemps des énergies renouvelables, le 24 mars dernier. Date importante pour la coopérative : nous fêtions l’inauguration de notre première centrale photovoltaïque !
Dans le cadre d’une étude commandée par RTE, le réseau de transport d’électricité, à ces étudiants de Sciences Po, les membres de notre coopérative ont été interviewé et filmé. La restitution de cette étude intitulée « impacts de la transition énergétique sur la solidarité territoriale » a eu lieu le vendredi 8 juin 2018 dans l’auditorium des locaux de RTE à la Défense où j’étais présente en tant que membre du conseil coopératif de Thau Energies Citoyennes.
La question au centre de l’étude est la suivante : Comment la transition énergétique, portée par de nouveaux acteurs, créée-t-elle de nouvelles solidarités territoriales locales ?
Pour y répondre, deux axes ont orienté les recherches :

1. Nouveaux acteurs, nouvelles solidarités locales

Cette première partie s’appuie sur trois études de terrain : à Lyon, en Ille-et-Vilaine, et dans l’Hérault. Elle souligne :
→ le rôle croissant des collectivités territoriales dans la mise en œuvre de la transition énergétique, en évoquant par exemple la stratégie de la région Occitanie, son ambition de devenir la première région à énergie positive. (https://www.laregion.fr/IMG/pdf/scenariorepos_brochure2017.pdf)
→ les projets citoyens comme vecteurs de nouvelles solidarités territoriales, avec notamment l’exemple de Thau Energies Citoyennes.
L’étude reprend la définition donnée par Energie partagée : « On appelle ‘citoyen’ un projet de production d’énergie renouvelable qui ouvre majoritairement son capital au financement collectif et son pilotage aux acteurs locaux, dans l’intérêt du territoire et de ses habitants. »
Les leviers d’émergence à de tels projets et les principaux freins sont identifiés. Les étudiants mettent en avant le fait que les citoyens et les collectivités territoriales ont intérêt à travailler ensemble afin de lever les freins rencontrés et de favoriser l’émergence et la réussite des projets citoyens.

Une distinction est établie entre financement participatif (exemple : plateformes types Enerfip) et financement citoyen (exemple : coopératives d’énergies renouvelables comme Thau Energies Citoyennes) : avec le premier, les citoyens sont financeurs, avec le second, ils sont aussi décideurs, et il y a un impact direct sur le développement du territoire et la solidarité.

2. Solidarités locales et nationales : quelles perspectives ?

Le Réseau de transport d’électricité repose sur le principe de solidarité nationale, c’est-à-dire une solidarité entre les territoires : afin que le tarif du réseau soit identique pour tous les habitants, pour tous les territoires, chacun va payer le même montant qu’il soit proches ou loin de la source de production d’électricité. Selon ce principe de solidarité, on ne paie pas plus si on est éloigné ou moins si on est proche de la source.
Or, le rôle croissant des collectivités territoriales et des projets citoyens dans la transition énergétique donne lieu à une décentralisation : on passe d’une solidarité nationale (entre territoires) à une solidarité locale (territoriale, au sein d’un territoire). Les étudiants de Science Po cherchent à analyser comment ces deux types de solidarité peuvent s’articuler, et à quelle échelle le service public d’électricité doit être organisé (nationale, locale…).
Une autre question concerne le financement de cette égalité tarifaire : pour permettre aux plus éloignés des sources de production d’électricité de ne pas payer davantage que ceux qui sont plus proches, RTE répartit les coûts du réseau de manière égale entre les consommateurs. Or, l’autoconsommation individuelle peut engendrer une baisse des recettes et remettre en cause cette égalité si celle-ci ne peut plus être financée. Face à cette réduction possible de la contribution à la solidarité entre les territoires, les personnes qui ne peuvent pas accéder à l’autoconsommation individuelle seraient pénalisées et paieraient davantage.
Pour y remédier, une des solutions avancées réside dans l’autoconsommation collective : elle permet à ceux qui n’ont pas les moyens de le faire individuellement de bénéficier de cette pratique, créant ainsi de nouvelles solidarités locales.

Reste la question des tarifs d’utilisation du réseau d’électricité à appliquer à ces types d’autoconsommation.

L’étude se demande aussi comment le service public du réseau d’électricité peut s’adapter aux nouvelles évolutions concernant la demande en électricité, qui dénotent deux mouvements contradictoires : d’une part une baisse de la consommation par une volonté de sobriété de la part des citoyens et une amélioration de l’efficacité énergétique (ampoule LED par exemple), et d’autre part une hausse de la consommation provoquée en grande partie par la mobilité électrique. Voitures, bus, vélos, bateaux et autres véhicules électriques ont l’avantage de ne pas polluer lors de leur utilisation, mais ils consomment de grandes quantités d’énergie lors de leur fabrication et lorsqu’ils se rechargent. La généralisation de ces véhicules entraîne une augmentation de la consommation d’électricité, si elle ne s’accompagne pas d’un véritable changement dans nos modes de vie, et dans nos modes de déplacement en particulier. En termes de mobilité, on ne peut donc pas simplement passer du pétrole à l’électricité : la sobriété et l’efficacité énergétiques sont plus que jamais essentielles. La hausse mondiale de la consommation d’électricité que l’on constate actuellement, due en partie à cette demande en mobilité électrique, doit nous le rappeler.


L’étude aborde aussi les questions relatives aux solutions techniques qui permettent de palier aux aléas tels que le déficit de production de certains territoires ou le problème de l’intermittence des énergies renouvelables. RTE peut y pallier au niveau national grâce à des échanges géographiques d’électricité. Mais des technologies plus respectueuses de l’environnement se développent à l’échelle locale : les projets de réseaux fermés, de smart grids ou de mini-réseaux. Elles présentent l’avantage de prendre en compte des critères plus focalisés sur le développement local (l’emploi local par exemple) et la préservation de l’environnement, que sur des choix purement technico-économiques (avantageant le réseau).

L’organisatrice de l’événement RTE et les étudiants de l’école urbaine de Science Po ont fait part de leurs remerciements chaleureux pour notre participation à leur étude. Nous les remercions également de l’intérêt qu’ils ont porté à notre initiative citoyenne, de leur étude de qualité et de la mise en valeur notre coopérative jusque dans les sphères parisiennes de RTE, l’entreprise qui gère le réseau public de transport d’électricité !

Télécharger la synthèse du projet collectif RTE

Thau Energies Citoyennes vue par les étudiants de Sciences Po Paris